Dans les eaux de la Réunion, un étonnant petit poisson de la famille des Gobiidae, Sicyopterus lagocephalus, appelé communément « Bichique » ou encore « Bichik », revêt à chaque fin d’été le maillot à poids du meilleur grimpeur.
Ce poisson amphihalin se reproduit et naît en rivière. Après la dévalaison, la croissance des larves se poursuit dans le milieu marin. Dès le mois d’Octobre, les postlarves pélagiques se regroupent au niveau des embouchures des rivières pour continuer leur métamorphose : les juvéniles devenus benthiques sont prêts à se reproduire et à entamer une montaison parsemée d’embûches et de parois verticales ! Cette espèce se caractérise par une ventouse subdiscoïdale formée par la coalescence des nageoires pelviennes. Cet organe lui confère des capacités exceptionnelles de franchissement des obstacles naturels (VOEGTLÉ et al. 2002). Ainsi, même une cascade ne lui fait pas peur ! On peut retrouver des individus à des hauteurs comprises entre 600 et 800 mètres d’altitude (VOEGTLÉ et al. 2002). Mais, en bon adepte des sports extrêmes, le Bichique ne se facilite pas la tâche : les adultes sont très rhéophiles, c’est-à-dire qu’ils affectionnent les secteurs où le courant est fort. Quoi de mieux pour jauger le meilleur grimpeur de la saison ?
On l’appelle également le « caviar créole » (50 €/kg) : le mode de vie de ce met très recherché, véritable pan du patrimoine culinaire de l’île, n’est pas sans rappeler, il est vrai, celui de l’esturgeon.